jeudi 5 août 2021

Le monde d'après et l'éternel retour du même

 Les puissants et leur médias affidés nous annoncent que rien ne sera plus jamais comme avant. Comme Napoléon lors de la campagne de Russie, ils veulent couper les ponts avec le passé afin de mieux orienter le troupeau vers l'avenir qu'ils nous ont concocté.

Ce monde d'après que la "grande réinitialisation" en cours est censée faire advenir laisse de marbre la philosophe Marylin Maeso interviewée hier sur France Inter dans le cadre de l'émission "Un monde nouveau" (ça ne s'invente pas !).

https://www.franceinter.fr/emissions/un-monde-nouveau/marylin-maeso-et-souleymane-diamanka

(l'entretien commence à 4'20'')

Spécialiste de l'oeuvre de Camus (l'auteur du fameux et tellement actuel "La Peste"), elle pointe vers l'énorme inertie de l'humain, sa tendance naturelle à la procrastination et sa capacité à se raconter des histoires ou à se bercer d'illusion avec des phrases comme "demain j'arrête !". 

Bref, le Grand Soir n'est pas pour demain, ou alors, un lent demain.

Elle évoque en fait ce que les psychosociologues appellent "la résistance aux changements" qui est la conséquence immédiate de notre nature d'"êtres d'habitudes". Chacun de nous est, en effet, un écosystème d'habitudes qui "tend à persévérer dans son être" pour parler comme Spinoza. La même chose prévaut au niveau de la société et engendre ce que Bourdieu appelait un "habitus", c'est-à-dire, une habitude sociale entretenue par le fait que les membres du groupe, s'imitant les uns les autres, entretiennent telle ou telle manière de se comporter. Au niveau de l'Histoire cette dynamique est identifiée comme "l'éternel retour du même".

Et le fait est que la majorité d'entre nous seraient soulagés et heureux de revenir au monde d'avant tant nous avons gravé en nous l'habitude d'une certaine liberté de mouvement, comme aller au restaurant, au cinéma ou tout autre spectacle quand l'envie nous en prend, sans que rien ne vienne faire entrave à notre désir.

Or c'est précisément cela que le pass sanitaire foule au pied. Il vient donc se heurter frontalement à la féroce propension de chacun à rester dans ses habitudes et toute la question est de savoir si la force de l'habitus sera suffisante pour résister à la tentative d'asservissement par la dictature sanitaire En Marche.

Marylin Maeso nous rappelle que Camus était sceptique quant aux révolutions, Il parlait des litres de sang et des quantités de souffrance et de sacrifice nécessaires pour amener des "nuances". Peut-être faudra-t-il payer ce même prix pour faire obstacle aux "nuances" totalitaires que les puissances de ce monde cherchent à nous imposer ? 

L'éternel retour du même dans l'Histoire n'est-il pas d'abord celui de la violence du conflit entre, d'une part, la volonté de puissance (affirmée par l'asservissement et la mise en esclavage) et, d'autre part, l'aspiration à la liberté ?


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